L’agenda setting

Avec plusieurs autres théories de la communication, l’« agenda setting » s’avère particulièrement intéressante parce qu’elle interroge une question fondamentale, celle de la formation de l’opinion public. Comment se forge t-on une opinion ? Comment en arrivons-nous à penser cela de ça ? dirais-je pour traduire la question de fond de façon triviale… Et pour l’adolescence qui entend se positionner et qui le fait, il peut être d’un grand secours de s’y intéresser.

L’originalité de cette théorie est de se situer dans un espace intermédiaire entre une théorie qui pense que l’opinion est directement influencée par les médias et une autre qui au contraire pense que le récepteur « filtre » ce qu’il reçoit par le fait qu’il ne peut entendre que ce qu’il veut entendre.

Mc Combe, l’initiateur de cette approche développe l’idée que les médias nous disent ce à quoi il faut penser et comment il faut le penser. L’influence est donc deux ordres :

  • Hiérarchique : l’ordre de l’information est décidée par les médias qui définissent en quelque sorte ce dont nous allons parlé, « notre agenda. »
  • Formelle : La forme de l’information car en plus de l’ordonner dans l’agenda, les médias nous la livre déjà « ficelée. » Reportage, élocution, prise de vue et j’en passe conditionne le rendu de l’information.

Une théorie qu’on peut résumer ainsi :

Les médias ne nous disent pas ce qu’il faut penser, mais ce dont il faut parler et la façon d’en parler.

Guy Labarraque

Sources :

Mc COMBS, M., SHAW, D. L., « The Evolution of Agenda-Setting : Twenty-Five Years in the Marketplace of Ideas », Journal of Communication, 43, n°2, 1993, p. 58-67.

SFEZ L. (1992), Critique de la communication, Paris, Point seuil, 528 p.

Autre théorie : les 5 axiomes de la communication

Les 5 axiomes de la communication selon Paul Watzlawick

Présentation

Il existe de nombreux modèles de communication, Watzlawick résume en 5 axiomes les principes de la communication :

  1. On ne peut pas ne pas communiquer
  2. Toute communication présente deux aspects : le contenu et la relation, tels que le second englobe le premier et par suite est une métacommunication
  3. La nature d’une relation dépend de la ponctuation des séquences de communication entre les partenaires
  4. La communication humaine utilise simultanément deux modes de communication : digital et analogique
  5. La communication est soit symétrique, soit complémentaire

Développement

1. On ne peut pas ne pas communiquer

Chaque être humain adopte un comportement X ou Y dans la vie et ce  comportement a valeur de message.  Même en ne faisant rien, on dit quelque chose… Avoir quelqu’un qui  ne dit rien en séance est porteur d’un message…

2. Toute communication présente deux aspects : le contenu et la relation, tels que le second englobe le premier et est par suite une métacommunication

Le premier aspect concerne ce qu’on veut faire passer, le contenu qui peut être oral ou écrit. Quand le climat de confiance règne, il est possible de dire que les interlocuteurs se concentrent sur ce pan là de l’acte de communiquer. Mais rien n’est jamais que du contenu…

On cherche toujours à communiquer autre chose, un contentement, une émotion et dans les cas où le climat n’est pas au rendez-vous, ce peut être de la frustration, de la colère. Pour Watzlawick, ce second aspect est prioritaire, car si la relation est mauvaise le contenu sera soit rejeté, soit déformé, soit ignoré.

Comment intervient ce « comment » de l’acte de communiquer ? Par  tout ce qui est du non-verbal (regard, intonation, gestuelle, mimique…). C’est ce qu’on appelle la métacommunication ; ce qui se communique quand on communique.

3. La nature d’une relation dépend de la ponctuation des séquences de communication entre les partenaires

La communication est un échange entre partenaires et ce que fait l’un à une incidence sur les autres et vice versa. Souvent on a tendance à considérer notre attitude seulement en réaction au comportement de l’autre, en minimisant l’impact de notre propre attitude. Voilà pourquoi on a sur les mêmes faits des avis opposés. Si « Monsieur » reste tard au travail, c’est que « Madame » lui fait constamment des reproches, mais pour cette dernière, les reproches sont une conséquence de ces retards… Allez comprendre ! Et bien justement, c’est là le problème…

du point de vue des échanges verbaux ; quand je dis quelque chose à quelqu’un, je ne peux pas sous-entendre que ce que j’ai dit est exempt d’intention. Mon discours va influencer la réponse de l’autre en conséquence de ce que j’ai dis. A mon tour, lorsque je vais entendre ce que mon interlocuteur me dit, je vais l’interpréter comme étant marqué, là aussi de X intentions qui peuvent être négatives ou positives.

Alors que se passe t-il ? Soit le « jeu conversationnel » tourne en rond et la relation risque d’être courte, soit il y a remise en cause de ce qui est dit, reformulation, et écoute… Dans ce cas là, la conversation continue, parce qu’elle va se « ponctue » positivement.

4. La communication humaine utilise simultanément deux modes de communication : digital et analogique

Si je veux communiquer que la montagne est haute à quelqu’un qui ne comprend pas ma langue, je vais faire des mouvements de la main qui montrent qu’il y a quelque chose qui monte et qui descend. Mon geste va ressembler à ce qu’il est censé signifier. C’est le langage analogique.

Si l’autre comprend ma langue, j’utilise le langage et donc un code qui ne montre rien… Seul la connaissance en commun de ce code me permet d’être compris par mon interlocuteur. C’est le langage digital.

Or, on a besoin des deux. La communication analogique définit la relation. Elle est très intuitive et signifiante, mais manque de souplesse, et peut s’avérer ambiguë. Les larmes, par exemple, peuvent exprimer la joie ou la peine, tout dépendra du contexte. On ne peut nier une émotion ou un sentiment, on ne peut que le vivre.

Pour lever l’ambiguïté propre à ce mode de communication, il faut le traduire, c’est-à-dire passer de l’analogique au digital, ou encore parler sur la relation, c’est-à-dire métacommuniquer. Naturellement, cette traduction, comme toute traduction, soulève le problème de la distorsion et de la perte d’information, d’où pour Watzlawick l’importance de la simultanéité.

5. La communication est soit symétrique, soit complémentaire

Une relation symétrique est une relation d’égalité qui minimise la différence. Une relation complémentaire, au contraire, maximise la différence, avec deux positions, l’une haute et  l’autre basse.

Nous sommes rarement dans une communication empreinte d’égalité, mais le plus souvent dans une relation complémentaire. On pourrait croire, dans ce type de relation que la position haute est meilleure. En réalité ce n’est pas juste, parce que celui qui l’occupe va toujours devoir démontrer qu’il a raison, qu’il communique mieux… Bref qu’il est « bon». Et lorsqu’on sait que dans un contexte de communication, cette position est toujours la plus faible, on mesure le challenge…

Guy Labarraque

Sources :

Watzlawick  P, Helmick J. 1979  Une logique de la communication. Paris, Le livre de poche, 280 p.

Autre théorie : l’agenda setting

Für deutsche Leser schlage ich die Webseite : Andreas Schroeder

Les fous du roi

Le film – synopsis

LES FOUS DU ROI – All the King’s Men

Date de sortie en salle : novembre 2006

Réalisé par Steven Zaillian
Avec Sean Pean, Jude Law, Kate Winslet, Mark Ruffalo, Anthony Hopkins

Long-métrage : américain et allemand

Genre : Drame
Durée : 2h15 min

Année de production : 2004

Le thème

Un journaliste raconte l’ascension d’un homme politique de terrain jusqu’à sa fin violente. Idéaliste et plein de passion pour ses compatriotes exploités par les détenteurs du capital (compagnies industrielles variées), Willie Stark parvient à se faire élire gouverneur Louisiane dans les années 30. Il finit cela étant par être gagné par la corruption et entraine avec lui, bon nombre de ceux qui le suivent. L’ascension sera à la hauteur de sa chute et celle de ceux qui l’on suivi.

Suivre… Mais jusqu’où ?

La trame narrative est celle du journaliste Jack Burden qui raconte l’histoire, nous sommes par conséquent en face de deux histoires dans le film ; celle de Willie Stark et celle du journaliste au contact de cette homme politique qu’il décide de suivre. Cette dernière histoire devient, au fur et à mesure que le film se déroule, plus saillante;  le roi Stark apparaît de moins en moins d’ailleurs à l’écran ; ce sont en revanche les conséquences de ses actes sur ses « fous » que l’on voit bien plus.

Mon avis personnel (à ne pas lire avant de voir le film…)

Le film est en effet intéressant plus pour ce qu’il suggère que pour ce qu’il montre. Au fond Jack Burden a l’occasion de faire un voyage au sein de son propre milieu et de creuser… Il est du clan de ceux qui sont contre Willie Stark, bonne famille, journaliste, filleule d’un juge estimé, bref du clan des riches. Son engagement derrière ce cul-terreux de gouverneur ne lui coute pas grand chose… Lorsqu’il est licencié par son journal qui soutient l’un des adversaires du candidat des pauvres, il ne vient pas demander du boulot. On lui en propose, Stark lui en propose et il accepte… Ce qui est passionnant c’est bien de voir ce journaliste confronté à son propre milieu qui même s’il le trahit en travaillant pour Stark, n’en continue pas moins à le fréquenter (il va déjeûner chez le juge Irwin). Aussi lorsque Stark lui demande de fouiller la vie du juge Irwin, parce que pour lui rien n’est bon (tout vient de la boue), c’est son innocence, son innocence affichée qui est attaquée. « Vous ne trouverez rien » dit-il à Stark à comprendre comme « je suis – nous sommes blancs comme neige »… Et finalement au bout du compte, Stark a raison on a tous quelque chose à se reprocher enfoui quelque part.

Il y a un côté assez psy dans ce film quand on voit Jack Burden dans une telle injonction paradoxale ; celle de clamer que son milieu est propre tout en n’arrêtant pas de chercher ce qui cloche… Et s’il voulait découvrir une vérité qu’il sent, qu’il a toujours senti et qu’on lui a caché ? Aussi, lorsqu’il la découvre, ça fait mal, très mal. La fin tragique du juge Irwin et ce que l’on découvre des liens qui l’unissent à Jack Burden est l’un des moments les plus forts du film… Le juge rattrapé par son histoire, sale et peu glorieuse, découverte par celui qui est en réalité son fils. C’en est trop, le juge Irwin ne supporte pas d’être vu avec d’autres yeux que ceux qui l’ont toujours vu, le père est déchu…

Dramatique histoire au demeurant entre un père et un fils qu’un cul-terreux de gouverneur parvient à révéler au grand jour. Stark parlait de boue, de terre à laquelle on revient tous.

Au fond le seul qui s’en sort dans le film, c’est Adam (le Adam sans Eve, il est seul, tout seul dans le film) ; le bon samaritain (il est le médecin de l’hôpital) qui ne résiste pas au fait de pouvoir soigner un maximum de personnes, raison pour laquelle il accepte de diriger l’hôpital de Stark. Mais, lorsqu’il se rend compte qu’en plus d’être manipulé, ça il le savait, mais qu’il comprend (on lui fait comprendre) que son hôpital n’est qu’une machine à blanchir de l’argent, il décide d’en finir avec Stark et le tue.

D’un point de vue cinématographique, je mentionnerai que Steven Zaillian, le réalisateur est avant tout un scénariste et pas n’importe lequel, puisqu’on lui doit les scénarios entre autres de la « liste Schindler » (Spielberg), d’« Hannibal » (Ridley Scott), et de Gang of New-York (Martin Scorsese). Il a donc travaillé avec les grands…

L’histoire en tant que tel

C’est d’abord une reprise d’un film de Robert Rossen (1949) qui est quelque part ce dont les américain aiment bien se nourrir sans pourtant jamais en sortir : ses héros qu’on finit par abattre. Que ce soit le héros qui dit vrai et qui en meurt comme l’est Martin Luther-King ou le héros qui dit vrai mais qui ne le reste pas… Pour les deux, au bout du chemin, c’est une mort violente. Dur dur d’être homme politique américain, gageons qu’un Barack Obama échappe à ce cercle infernal. Qui vivra verra…

A propos de faits réels, le personnage du film est inspiré de Huey Pierce Long qui dans les années trente eut une fulgurante carrière. Issu de milieu paysan, il devient avocat et se fait élire en 1928 avec un programme très « social » qui en fit grincer plus d’un. Construction de routes, de ponts et surtout gratuité pour les moins bien lotis dans les écoles et les hôpitaux. Il n’hésite cependant pas à se laisser soutenir par quelques organisations mafieuses pour faire face à ses ennemis en particulier ceux qui l’avaient attaqué lors de ses campagnes.

C’est dans sa campagne électorale pour la maison blanche, comme candidat indépendant, qu’il est « stoppé » par les balles du gendre de l’un de ses ennemis…

Il a inspiré le romancier Robert Penn Warren qui écrivit All the King’s Men, titre repris tant par Rossen que par Zaillian pour leurs films. Quant à l’ouvrage de Warren, il reçut le prix Pulitzer en 1946.

A noter enfin que le frère d’Huey Pierce Long, Earl Long, est aussi une figure politique marqunte de la première moitié du XXè siècle en Louisiane. Trois fois gouverneur de cet Etat, il eut lui aussi les honneurs et de la littérature et du septième art… Paul Newman interprétera son personnage dans un film de Ron Shelton en 1989, Blaze. Et pour la petite histoire, l’auteur de la biographie d’Earl Long, à partir duquel le film de Blaze est construit, est sa compagne, stripteaseuse…

Rédaction : Guy Labarraque

Voir : animation

Sources

  • wikipédia
  • Allo-ciné